Vendre son fonds de commerce

Vendre son fonds de commerce

Plusieurs raisons peuvent conduire un entrepreneur à envisager la cession de son fonds de commerce : reconversion professionnelle, financement d’un nouveau projet entrepreneurial, etc. Afin de valablement procéder à une telle cession, le vendeur et l’acquéreur du fonds de commerce ont tout intérêt à observer rigoureusement les conditions attachées à la validité d’une telle cession (I). Au-delà des conditions de validité, une cession de fonds de commerce entraîne des obligations à la charge du vendeur et de l’acquéreur (II)

I – Quelles sont les conditions de validité d’une cession de fonds de commerce ?

La validité d’une cession de fonds de commerce repose à la fois sur les conditions issues du droit commun des contrats (A) et du droit spécial applicable aux contrats de vente (B)

A – Les conditions issues du droit commun des contrats 

En application de l’article 1128 du Code civil, la validité d’un contrat repose sur le consentement des parties, leur capacité à contracter un contenu licite et certain. 

En vertu de l’article 1129 du même code, seule une personne saine d’esprit peut valablement consentir à une cession de fonds de commerce. De plus, ce consentement doit être exempts de vice tel que l’erreur sur les qualités essentielles de la prestations due, ou du cocontractant (article 1132), le dol (article 1137) et la violence (article 1140), sous peine de nullité relative du contrat. 

S’agissant de la capacité juridique, l’article 1146 du Code civil précise que les mineurs non émancipés et les majeurs protégés sont incapables de contracter. Ainsi, la cession de fonds de commerce dont l’un des cocontractants est un mineur non émancipé ou un majeur protégé est frappée de nullité relative, conformément à l’article 1147 du Code civil. 

Le contenu du contrat de cession ne doit pas déroger à l’ordre public et la prestation (le prix et le fonds de commerce) doit être déterminée ou déterminable, conformément à l’article 1163 du Code civil. Ce même article précise que « la prestation est déterminable lorsqu’elle peut être déduite du contrat ou par référence aux usages ou aux relations antérieures des parties, sans qu’un nouvel accord des parties soit nécessaire ». 

B – Les conditions issues du droit des contrats spéciaux 

En matière de cession de fonds de commerce, il est nécessaire de respecter des conditions de fond (1) et des conditions tenant à la publicité de l’acte (2)

1 – Les conditions de fond d’une cession de fonds de commerce 

La cession de fonds de commerce est un acte de commerce. Pour cette raison, l’acquéreur du fonds doit disposer de la capacité commerciale. De ce fait, outre les incapacités mentionnées à l’article 1146 du Code civil, la personne majeure ayant été condamnée pour certains délits (par exemple, la faillite personnelle) ne peut avoir la capacité commerciale et se porter acquéreur d’un fonds de commerce. 

De même, certaines personnes ne peuvent se porter acquéreur d’un fonds de commerce. En ce sens, l’article 1596 du Code civil prévoit que « ne peuvent se rendre adjudicataires, sous peine de nullité, ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées : les tuteurs, des biens de ceux dont ils ont la tutelle ; les mandataires, des biens qu’ils sont chargés de vendre ; les administrateurs, de ceux des communes ou des établissements publics confiés à leurs soins ; les officiers publics, des biens nationaux dont les ventes se font par leur ministère ». 

Plus que la capacité commerciale, certaines exploitations nécessitent également une capacité professionnelle. Par exemple, la cession d’une officine ou d’un salon de coiffure n’est possible que si l’acquéreur dispose d’un diplôme en la matière. 

L’erreur sur les qualités essentielles et le dol étant des causes de nullité du contrat, certaines informations doivent être impérativement communiquées. L’article L141-2 du Code de commerce prévoit : 

« Au jour de la cession, le vendeur et l’acquéreur visent un document présentant les chiffres d’affaires mensuels réalisés entre la clôture du dernier exercice comptable et le mois précédant celui de la vente. 

Pendant une durée de trois ans à compter de l’entrée de l’acquéreur en jouissance du fonds, le vendeur met à sa disposition, à sa demande, tous les livres de comptabilité qu’il a tenus durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente. 

Toute clause contraire est réputée non écrite. » 

Le vendeur du fonds de commerce doit porter une attention particulière aux informations qu’il communique à l’acquéreur. Si leur inexactitude ou leur omission sont constitutives d’un dol, la cession du fonds de commerce sera nulle conformément à l’article 1137 du Code de commerce. Dans le cas contraire, l’inexactitude de ces informations pourra tout de même justifier une action en garantie des vices cachés en application de l’article L141-3 du Code de commerce. 

En vertu de l’article 1584 du Code civil, la cession de fonds de commerce peut être faite purement et simplement, ou sous une condition soit suspensive, soit résolutoire. En d’autres termes, la cession de fonds de commerce peut être assortie de la condition suspensive d’obtention d’un prêt bancaire. 

2 – Les conditions de forme d’une cession de fonds de commerce 

Les articles L141-12 et suivants du Code de commerce prévoient une procédure de publicité des cessions de fonds de commerce. 

L’article L141-13 du Code de commerce dispose que l’acte de cession de fonds de commerce (sauf en cas d’acte authentique) ou, à défaut d’acte, la déclaration faite à l’administration fiscale doit faire l’objet d’un enregistrement en application de l’article 638 du Code général des impôts. 

Dans les quinze jours suivant la cession de fonds de commerce, celle-ci doit être « publiée à la diligence de l’acquéreur sur un support habilité à recevoir des annonces légales dans le département dans lequel le fonds est exploité et sous forme d’extrait ou d’avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ». 

Dans un délai de dix jours à compter de cette publication, les créanciers disposent d’un pouvoir d’opposition. Ce pouvoir confère aux créanciers, estimant que le prix est trop bas, le droit de procéder à une surenchère du prix afin d’obtenir l’intégralité du montant de sa créance sur le prix de vente. 

II – Quels sont les effets d’une cession de fonds de commerce ?

Le respect des conditions de validité d’une cession de fonds de commerce a pour effet de faire naître des obligations à la charge du vendeur (A) et de l’acquéreur (B)

A – Les obligations du vendeur 

L’article 1603 du Code civil dispose que le vendeur a deux obligations principales : celle de délivrer la chose et celle de la garantir. 

En application de l’article 1604 du Code civil, le vendeur d’un fonds de commerce respecte son obligation de délivrance lorsqu’il met ce dernier en la puissance et possession de l’acheteur. Ainsi, l’exploitation du fonds de commerce doit être rendue pleinement possible par le vendeur du fonds. À défaut, l’article 1610 du Code civil prévoit que l’acquéreur « pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur ». Si le retard de délivrance cause un préjudice à l’acquéreur, le vendeur s’expose à une condamnation aux dommages et intérêts conformément à l’article 1611 du Code civil. 

S’agissant de son obligation de garantie, le vendeur d’un fonds de commerce est tenu à une obligation de garantie d’éviction. En ce sens, l’article 1626 du Code civil oblige le vendeur à garantir l’acquéreur « de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou partie de l’objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente ». Les conditions de la cession de fonds de commerce ne peuvent permettent le vendeur du fonds de commerce à récupérer tout ou partie de la clientèle cédée. En définitive, l’acquéreur doit pouvoir jouir pleinement de ses droits sur le fonds de commerce cédé. 

Le vendeur du fonds de commerce est également tenu de garantir l’acquéreur contre les vices cachés. Le vice caché désigne tout défaut caché au moment de la vente, affectant le fonds de commerce et le rendant impropre à l’usage auquel il est destiné, ou qui diminue tellement son usage que l’acquéreur ne l’aurait pas acquis ou en aurait donné un moindre prix. 

B – Les obligations de l’acquéreur 

Contrairement au vendeur du fonds de commerce, l’acquéreur n’est tenu qu’à une obligation. En application de l’article 1650 du Code civil dispose que « la principale obligation de l’acheteur est de payer le prix au jour et au lieu de réglés par la vente ». L’article 1651 du Code civil précise que l’acheteur doit payer au lieu et dans le temps où doit se faire la délivrance. 

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